Le secteur maritime a évité une grève d’une forte ampleur outre-Atlantique
Quasiment un an après la côte Ouest, ce sont les dockers de la côte Est américaine qui ont engagé une grève à durée indéterminée. Le secteur maritime garde un très mauvais souvenir de la grève des dockers californiens dont les négociations avaient duré presque un an avec comme conséquences une série de pénurie et des retards hors normes.
Cette fois-ci, ce sont les dockers de la côte Est et du golfe du Mexique qui ont décidé de faire valoir leurs droits, sans doute galvanisés par leur confrères californiens. Un préavis de 14 jours a été déposé avec un ultimatum à début octobre en cas d’échec des négociations.
Face à cette nouvelle grève, à quelques semaines des rushs de fin d’année, les compagnies maritimes ont décidé d’anticiper les blocages éventuels en annonçant des surtaxes en prévision des futurs retards.
Le conflit reposait principalement sur une demande d’augmentation des salaires mais aussi sur des revendications par rapport à l’automatisation de terminaux opérés par Maersk en Alabama qui auraient été lancés sans l’accord des deux parties comme le veut la règle, notamment en termes de compensations. Rappelons que l’automatisation a pour but de gagner en productivité mais qu’elle a aussi pour conséquence de réduire la masse salariale employée sur les terminaux.
Afin de limiter la casse, les compagnies maritimes ont commencé à envisager un détour par la côte Ouest, mais ceci aurait engendré de fortes congestions portuaires et donc des retards de livraison et de rotation de containers. Une situation qui aurait pu faire grimper les taux.
Les professionnels du secteur souhaitaient que l’administration Biden fasse annuler la grève en jouant sur une loi de 1947, la loi Taft-Hartley, qui autorise la Maison Blanche, en cas d’urgence nationale, à interdire une grève. Une demande quelque peu candide compte tenu du fait que l’administration, démocrate de surcroît, et en pleine réélection, ne pouvait se permettre de fâcher des travailleurs américains.
Au final, les dockers ont obtenu une augmentation de salaire de 62% sur 6 ans, une victoire à regarder sous divers angles : si les dockers ont bien obtenu gain de cause, cela ne signifie pas que l’automatisation des ports en est pour autant stoppée. En effet, le terminal automatisé de Maersk, qui faisait partie des sources du conflit, n’est qu’un terminal parmi d’autres qui seront, à termes, eux aussi automatisés. Une automatisation des terminaux qui impliquera un non-remplacement des départs à la retraite et une masse salariale en baisse.
En contrepartie, les dockers restants et les futurs nouveaux entrants seront mieux payés et avec de nouvelles qualifications. Après tout, ce n’est que l’évolution classique d’un métier dans un nouvel univers technologique. Les dockers étaient beaucoup plus nombreux avant que les machines ne viennent aider aux chargements au début du XXème siècle, leur nombre s’est réduit petit à petit, et en ce premier quart du 21ème siècle, on assiste exactement au même phénomène.
Pour la supply chain c’est un soulagement : quand on sait que celle-ci peine à trouver un rythme stable cette année avec le conflit mené par Israël, le canal de Suez entravé par des rebelles Houthis ou encore le canal de Panama qui reprends à peine son trafic normal, nul doute que la perspective d’une grève a dû donner quelques sueurs froides aux acteurs du transport, d’où le branle bas de combat général des armateurs avant même que la grève n’ait eu le temps de battre son plein.