Faire neuf avec du vieux : l’immobilier s’adapte à la crise du neuf

Nous l’avions évoqué encore tout récemment, le milieu du BTP fait face à un attentisme inédit de la part de ses clients. Crise sanitaire puis crise économique liée (en majeure partie) au conflit opposant la Russie à l’Ukraine, il n’en fallait pas moins pour que le marché se fige et fasse preuve de frilosité quand il s’agit d’investir dans le neuf.

Si les carnets de commandes étaient pleins, l’arrêt des chantiers a eu un effet massue sur les acteurs du marché, quelle que soit leur taille. En effet, faire du neuf implique beaucoup de main d'œuvre, beaucoup de matières premières et une forte dépense en énergie, autant de facteurs qui ont aujourd’hui considérablement augmenté et qui font exploser les budgets initialement prévus sur la majorité des projets immobiliers.

Face à cette augmentation des prix de la construction et de celle des taux d’emprunt, impossible pour les acteurs du BTP et de l’immobilier de forcer les gens à investir dans un tel contexte. Les prix au m² flambent, les banques n’accordent que très peu de prêts et à des taux très élevés, c’est tout le marché du logement et de la construction qui se retrouve à l’arrêt depuis le début de la crise économique et ne semble pas se diriger vers une accalmie en cette fin d’année 2023.

Les promoteurs ont donc décidé d’attaquer un marché encore jusque-là peu exploité : l’ancien. La réhabilitation immobilière est une voie toute trouvée pour pouvoir proposer des projets attrayants et à moindre coût, à la fois pour le promoteur, mais aussi, in fine, pour l’acheteur. De nombreux promoteurs jusque-là spécialisés dans le neuf changent leur fusil d’épaule et ceux qui y étaient déjà accélèrent leurs investissements comme Nexity ou Altarea.

Il faut dire que les bâtiments anciens pouvant être réhabilités sont nombreux en France : anciens bâtiments d’État, anciennes maisons de retraite, usines désaffectées, entrepôts, de nombreux biens aujourd’hui laissés en friche peuvent pourtant devenir de formidables bâtiments attractifs aussi bien pour le logement que pour le commerce. Nous constatons un fort regain de remise à neuf des bâtiments ces dernières années comme, par exemple, à Cannes où une ancienne résidence Pierre & Vacances a été réhabilitée en résidence à appartements qui se sont vendus en un rien de temps.

Toujours au Sud, à Marseille, la ville persiste dans la réhabilitation de projets comme le J1, ancien bâtiment du port autonome aujourd’hui délaissé qui devrait devenir une grande halle de producteurs avec restaurants, bars et même une piscine pour attirer Marseillais et touristes.

De nombreux gros bâtiments anciens comme des mas provençaux ou d’anciens châteaux, sont désormais réhabilités et divisés en lots pour devenir de véritables résidences dont le charme de l’ancien a tendance à séduire rapidement les acheteurs. Ces réhabilitations se font bien entendu dans les règles de l’art, tout y passe, électricité, plomberie, chauffage, ces bâtiments autrefois passoires thermiques sont repris de A à Z pour répondre aux nouvelles normes d’économie d’énergie. Nombreuses sont les villes et agglomérations disposant d’un parc immobilier ancien non exploité et qui peut rapidement s’adapter aux nouveaux modes de vie. Logements, commerces, bureaux, les possibilités sont nombreuses et les promoteurs l’ont bien compris.

Bien sûr, la réhabilitation de l’ancien ne va pas sans difficultés. Un diagnostic est d’abord obligatoire (notamment les PEMD pour des chantiers au-delà de 1000 m²). Il faut en effet s’assurer que l’immeuble n’est pas en grand péril, qu’il n’est pas complètement amianté et, bien souvent, les promoteurs qui détectent un potentiel dans une vieille bâtisse, achètent sans avoir encore obtenu de permis de construire et sans avoir pu évaluer le coût d’une rénovation. Les promoteurs jouent certes à la loterie, mais si le bien est rénovable, la plus-value est grande et, dans le cas contraire, ils peuvent à terme envisager une démolition avec une reconstruction neuve.

Du côté des acheteurs, l’ancien attire finalement autant voire plus que le neuf. Si les réhabilitations sont bien faites, les bâtiments retrouvent un véritable cachet apte à séduire le grand public. Idem pour le voisinage qui voit d’un meilleur œil de vieux bâtiments restaurés, que de longs chantiers de bâtiments neufs souvent stéréotypés et rarement aussi appréciés que certains immeubles centenaires.

Les promoteurs immobiliers semblent ainsi trouver dans la réhabilitation de l’ancien un nouveau moyen de maintenir leur activité avec parfois un coût moins élevé et une empreinte carbone plus faible. Ce qui, par les temps qui courent, n’est pas négligeable. En attendant que le neuf retrouve des couleurs, c’est tout un parc immobilier ancien qui va se retrouver refait à neuf, pour le plus grand bonheur des mairies qui n’ont pas toujours les moyens de réhabiliter ces bâtiments abandonnés mais dont le potentiel reste grand.

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